RDC – MASSAD BOULOS : « LA PAIX, C’EST UN PROCESSUS, PAS UN INTERRUPTEUR QU’ON ALLUME OU QU’ON .

Le conseiller spécial de Donald Trump pour l’Afrique reste confiant sur la perspective de parvenir à un accord de paix définitif entre la RDC et le Rwanda, malgré l’enlisement voire le recul des processus en cours. Il l’a confié à Jeune Afrique dans un entretien exclusif. Par Quentin Velluet, Romain Chanson et Romain Gras

Massad Boulos, le conseiller spécial de Donald Trump pour l’Afrique, Massad Boulos. © DR

La mission de Massad Boulos dans l’est de la RDC est loin d’être terminée. Contrairement aux affirmations de Donald Trump, la guerre n’est pas finie et les négociations pour y mettre un terme connaissent des retards, voire de sérieux revers. La RDC a ainsi refusé de signer un accord-cadre d’intégration régional avec le Rwanda, piloté par les États-Unis, et ce pour protester contre le maintien des troupes rwandaises sur son territoire.

Comment l’entrepreneur et diplomate imagine-t-il l’avenir des efforts de paix entamés par un président américain qui, malgré son souhait ardent, n’a finalement pas été nommé prix Nobel de la paix ? Interrompu à plusieurs reprises par des appels avec le secrétaire d’État, Marco Rubio, au sujet des accords entre Israël et le Hamas, l’Américano-libanais a répondu aux questions de Jeune Afrique en marge du Global Gateway Forum. Organisé les 9 et 10 octobre à Bruxelles, il a réuni notamment Félix Tshisekedi et Paul Kagame.

Jeune Afrique : Êtes-vous surpris que Kinshasa n’ait pas signé le volet économique de l’accord entre le Rwanda et la RDC ?

Massad Boulos : L’essentiel, c’est qu’ils finalisent le texte. Ensuite, il sera signé par les deux pays au moment opportun. Bien sûr, il y a certaines conditions préalables à respecter pour que l’accord soit appliqué. Ce sont des préoccupations légitimes. Les inquiétudes concernent seulement les mesures à mettre en place pour faire appliquer l’accord, et on doit pouvoir s’entendre là-dessus.

Le président Donald Trump s’est félicité, à plusieurs reprises, d’avoir « résolu le conflit entre la RDC et le Rwanda ». N’est-il pas prématuré, aujourd’hui, de parler de retour à la paix ?

Non, pas du tout. Le président Trump faisait référence à l’accord de paix historique qui a été signé le 27 juin. Mais la paix est un processus, ce n’est pas un interrupteur qu’on allume ou qu’on éteint. Les parties se sont engagées dans cette médiation et, pour que cela fonctionne, il fallait d’abord que tous les mécanismes nécessaires soient mis en place.

Les parties s’étaient donné 90 jours pour le faire, et c’est désormais le cas. Nous pouvons donc passer à la prochaine phase. Il faut comprendre que tout cela a commencé bien avant la signature du 27 juin, il y a eu des négociations pour parvenir à cet accord. Ce travail se poursuit.

Avez-vous un calendrier pour la neutralisation des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) réclamée par Kigali ?

Cela fait partie des négociations en cours et du dispositif que nous avons lancé récemment, le Mécanisme conjoint de coopération en matière de sécurité, auquel les États-Unis apportent leur aide. Il comporte différentes phases. La première dure 90 jours, jusqu’à la fin de cette année. Ces détails de calendrier doivent être discutés par le Mécanisme.

Les sanctions sont un outil que nous gardons sous la main, mais nous espérons vraiment que tout le processus se déroulera sans heurt.

Les États-Unis vont-ils maintenir leur rôle de médiateur dans cette crise ?

Absolument. Nous apportons un soutien total et une assistance technique complète à tous ces dispositifs. L’accord de paix est unique, dans le sens où il prévoit plusieurs rouages pour garantir sa mise en œuvre. Et, depuis qu’il a été signé, nous avons ajouté plusieurs comités : l’un est consacré aux questions humanitaires, il y a également le Mécanisme conjoint et enfin le comité travaillant sur les questions économiques.

C’est cela, l’aspect unique de cet accord : il est complet, et dispose des rouages permettant aux deux parties de progresser. Mais rien ne peut être fait du jour au lendemain.

Les États-Unis sont-ils prêts à imposer des sanctions aux deux parties si les engagements pris en juin ne sont pas respectés ?

Les États-Unis disposent de nombreux outils à leur disposition, qui peuvent être utilisés si nécessaire et déclenchés à tout moment. En août, nous avons annoncé certaines sanctions contre des individus et des groupes impliqués dans l’exploitation minière et le commerce illicite de minerais. Le M23 a été sanctionné par les États-Unis sous l’administration précédente. C’est un outil que nous gardons sous la main, mais nous espérons vraiment que tout le processus se déroulera sans heurt, afin de ne pas avoir à y recourir.

Beaucoup d’entreprises américaines sont prêtes à investir des milliards de dollars en RDC.

Qu’en est-il des perspectives d’investissements américains que vous souhaitez promouvoir dans le cadre de ce processus ?

C’est aussi en cours de finalisation et tout cela sera officialisé très bientôt dans le cadre d’une cérémonie d’annonce globale. Notre premier objectif, le principal, c’est de ramener la paix dans la région. Le second c’est effectivement la mise en place d’une coopération économique stratégique dont nous sommes en train de négocier les détails avec la RDC. Nous discutons aussi d’axes de coopération avec le Rwanda et, peut-être plus tard, avec d’autres États de la région.

Il y a aujourd’hui beaucoup d’entreprises – américaines, mais pas seulement – qui sont prêtes à investir des milliards de dollars en RDC. Et pas uniquement dans les mines. Les États-Unis soutiennent cela à travers la DFC (Development Finance Corporation). Il y a aussi le corridor de Lobito, pour lequel nous apportons un important soutien économique, notamment pour la rénovation du chemin de fer jusqu’en RDC.

Author: MANZI
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